Adoption définitive de la loi 3DS par le Parlement

Issu du grand débat organisé après la crise des Gilets jaunes, le projet de loi 3DS sur la décentralisation a été définitivement adopté par le Parlement, le mercredi 9 février. Ce projet de loi est le fruit d’un travail avec les élus locaux et les associations d’élus. La loi 3DS comprend des mesures pour différencier, décentraliser, déconcentrer et simplifier l’action locale. Lors de sa présentation en Conseil des ministres, le 12 mai 2021, le texte comprenait 83 articles. Il en compte désormais 270, après une commission mixte paritaire conclusive. Ce texte, très technique, donne de nouvelles compétences aux collectivités, de nouvelles places et responsabilités aux élus, et simplifie certaines démarches administratives.

Voici les principales mesures adoptées :

En matière de différenciation

  • Le principe de différenciation est acté dans la loi. Les collectivités, notamment les Régions et les départements, pourront désormais formuler des propositions de modifications législatives ou réglementaires pour les adapter aux réalités territoriales.
  • Les collectivités pourront mettre en œuvre des délégations de compétences projet par projet, afin que l’une d’entre elles puisse piloter la réalisation d’un projet d’intérêt commun.
  • Le pouvoir réglementaire des collectivités est étendu à de nouveaux domaines.
  • Les outils de démocratie participative sont renforcés, avec l’abaissement des seuils à partir desquels l’assemblée d’une collectivité ou d’une intercommunalité doit se saisir d’une pétition locale.
  • Les communes et leurs intercommunalités pourront décider conjointement de transférer des compétences facultatives à l’intercommunalité de manière différenciée selon les communes.
  • Le transfert de la compétence eau et assainissement aux intercommunalités sera précédé d’un débat avec les communes sur les modalités de sa mise en œuvre. Ces modalités pourront être actées dans une convention. Les intercommunalités pourront mobiliser leur budget général afin d’éviter une augmentation excessive des tarifs de l’eau lorsque des investissements importants seront nécessaires ainsi que dans la période d’harmonisation des tarifs qui suivra la prise de compétences par l’intercommunalité. Les syndicats d’eau infracommunautaires existants au moment du transfert de compétences seront maintenus dans le cadre d’une délégation, sauf si l’intercommunalité décide de les supprimer.
  • Le transfert de la maîtrise d’ouvrage d’opérations d’aménagement du domaine routier entre collectivités territoriales devient possible. Les collectivités et leurs groupements pourront aussi installer des radars automatiques sur leur domaine routier.
  • La coopération transfrontalière est renforcée en matière sportive, sanitaire, d’apprentissage ou de commerce. La coopération entre les professionnels de santé à l’échelle des bassins transfrontaliers est ainsi facilitée.

En matière de décentralisation

  • Les Régions pourront se voir déléguer une partie des crédits du fonds chaleur et du fonds économie circulaire de l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), afin d’augmenter les financements disponibles grâce au cofinancement des Régions.
  • L’investissement des collectivités dans des actions favorables à la biodiversité et au développement des énergies renouvelables est également facilité.
  • Le régime juridique de protection des alignements d’arbres est clarifié, afin de mieux associer les maires à la procédure d’autorisation pour porter atteinte à un alignement d’arbres et simplifier ladite procédure pour les arbres malades.
  • La prise en charge des dégâts causés aux habitations par les phénomènes de sécheresse et la réhydratation des sols est améliorée.
  • La possibilité pour le plan local d’urbanisme (PLU) de délimiter les secteurs dans lesquels l’implantation d’éoliennes est soumise à conditions est clarifiée. Les communes limitrophes de la commune d’implantation sont désormais consultées dès le début du projet.
  • La gestion des sites Natura 2000 terrestres est transférée aux Régions. Le rôle du conseil départemental dans la création de ces sites est également renforcé.
  • L’entretien des chemins ruraux est facilité afin d’enrayer leur disparition.
  • Le texte crée, par ailleurs, un pouvoir de police spéciale dans les espaces naturels protégés et allège la responsabilité des propriétaires et des gestionnaires de sites ouverts au public.
  • Le texte rend possible le transfert des routes nationales aux départements et aux métropoles. Il transfère temporairement aux collectivités et aux groupements volontaires la maîtrise d’ouvrage d’opérations d’aménagements routiers. Il prévoit également les modalités de transfert de la gestion des petites lignes et gares ferroviaires « en garantissant la transmission à la Région des règles de maintenance et de sécurité nécessaires à l’exercice de ses missions ».
  • Le texte prolonge de six mois les délais pour modifier les documents d’urbanisme en application de la loi Climat et résilience vers le ZAN (zéro artificialisation nette).
  • La loi SRU (solidarité et renouvellement urbains) est pérennisée au-delà de 2025 et mieux adaptée aux contraintes locales. Des contrats de mixité sociale, signés entre le maire, le président de l’intercommunalité et le préfet, permettront d’adapter les objectifs triennaux de production de logements sociaux en fonction des contraintes rencontrées.
  • Les collectivités pourront fixer des objectifs d’attribution de logements sociaux aux ménages aux revenus modestes dont les métiers ne peuvent être exercés en télétravail.
  • Les collectivités pourront récupérer plus rapidement les biens sans maîtres et abandonnés afin de conduire leurs projets d’aménagement et de rénovation du bâti.
  • Les opérations de revitalisation des territoires seront renforcées.
  • Pour lutter contre le phénomène des lits froids dans les stations de montagne, le modèle des résidences de tourisme sera conforté en permettant à des foncières locales portées par les collectivités d’être prioritaires pour l’achat de logements en vue de poursuivre leur location.
  • Le rôle des collectivités dans les politiques de santé est conforté. Ainsi,  le conseil de surveillance des agences régionales de santé (ARS) est transformé en conseil d’administration, présidé par le préfet de Région et dont 3 des 4 vice-présidents seront des élus locaux. Les parlementaires pourront y siéger avec voix consultative. Il rendra un avis motivé sur le projet régional de santé. Il effectuera un bilan régulier de la désertification médicale et pourra formuler des préconisations. Les directeurs départementaux des ARS présenteront annuellement au président du Conseil régional le bilan de leur action. Par ailleurs, il est prévu que les contrats locaux de santé, signés par l’ARS et les collectivités, le seront en priorité dans les zones caractérisées par une insuffisance de l’offre de soins. Les collectivités pourront participer, sur une base volontaire, au financement des investissements des établissements de santé de tout type. Enfin, les communes, les intercommunalités, les départements, ainsi que les Régions via des groupements d’intérêt public les associant à au moins une autre collectivité, pourront recruter du personnel soignant pour les centres de santé.
  • Le texte permet aux communes d’alimenter une base nationale des adresses qui permettra de géolocaliser chaque habitation, facilitant ainsi des services publics et privés (raccordement à la fibre optique, livraisons, etc.).

En matière de déconcentration

  • Le préfet sera désormais le délégué territorial de l’Ademe et de l’Office français de la biodiversité (OFB) afin de garantir la cohérence de l’action de l’État et de ses opérateurs sur le territoire.
  • Le préfet de bassin présidera le conseil d’administration des Agences de l’eau. Les préfets de département présenteront régulièrement aux instances de l’Agence les projets structurants de l’État et des collectivités dans leur département.
  • Les préfets de département pourront se voir déléguer, par le préfet de Région, l’attribution des crédits de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL).
  • Le Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement), établissement public de l’État, deviendra un outil commun de l’État et des collectivités qui choisiront d’y adhérer, pour lesquelles il pourra fournir directement des prestations d’ingénierie.
  • Un cadre légal sera donné aux maisons France services.

En matière de simplification

  • La loi clarifie les règles pour des élus mieux protégés dans l’exercice de leur mandat en actant le principe selon lequel les élus désignés pour représenter leur collectivité auprès d’un organisme extérieur ne sont pas considérés, du seul fait de cette désignation, comme étant en situation de conflit d’intérêts ou de prise illégale d’intérêt lorsque leur collectivité ou EPCI délibère sur ses relations avec cet organisme (et réciproquement), en créant un droit, pour les élus locaux, de consulter un référent déontologue, ou encore en fixant le statut des élus qui siègent au conseil d’administration de filiales d’entreprises publiques locales.
  • Elle améliore la transparence des entreprises publiques locales sans entraver le fonctionnement de celles-ci.
  • Le texte allège les contraintes, notamment les obligations déclaratives des élus locaux auprès de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique.
  • Le texte allège également la responsabilité des propriétaires et gestionnaires de sites naturels ouverts au public, étend les facultés des collectivités territoriales et de leurs groupements à recourir au financement participatif pour financer leurs investissements.
  • Enfin le texte simplifie les normes et permet aux assemblées délibérantes des Régions, des départements et des intercommunalités de recourir de manière pérenne à la visioconférence, élargit aux syndicats mixtes compétents le bénéfice du droit de préemption des terres agricoles sur les aires d’alimentation des captages d’eau potable, transfère la propriété des canalisations de gaz naturel, des propriétaires vers le gestionnaire du réseau public de transport de gaz naturel, en 2026 au plus tard pour les cas les plus complexes et dès 2023 pour les autres.