Webinaire ANEM / Territoires conseils : retour sur les principales dispositions de la loi de finances pour 2022

Près de 70 élus ont répondu présent à l’invitation de l’ANEM et de Territoires conseils le lundi 17 janvier pour le webinaire consacré aux principales dispositions de la loi de finances pour 2022 pour les collectivités territoriales.

L’ANEM et Territoires conseils de la Banque des territoires ont organisé, le lundi 17 janvier, un webinaire sur les principales dispositions à destination des collectivités territoriales contenues dans la loi de finances pour 2022. Ce webinaire a été l’occasion d’aborder de nombreux points : le cadrage général de la loi de finances pour 2022, l’actualité de la réforme de la taxe d’habitation (TH), la révision unilatérale des attributions de compensation, les concours financiers de l’État ainsi que la réforme des indicateurs financiers et fiscaux, ou encore le soutien de l’État aux collectivités locales.

Le cadrage général de la loi de finances pour 2022

La loi de finances pour 2022 prévoit une réduction du déficit public, une stabilisation de l’endettement national et une baisse de la croissance par rapport à 2021. La perspective de croissance est estimée à 4% en 2022, ce qui constitue un net rebond. Concernant les collectivités, les principales mesures de la loi de finances sont :

  • La revalorisation forfaitaire des valeurs locatives : la reprise de l’inflation est automatiquement prise en compte dans le cadre de la réévaluation forfaitaire des valeurs locatives des locaux d’habitation. Pour le coefficient 2022, l’évolution de l’indice des prix à la consommation harmonisé sur un an ressort à +3,40%. Elle est donc égale à ce pourcentage (contre 0,2% l’année dernière). Ce taux s’applique aux valeurs locatives foncières (taxe foncière sur les propriétés bâties, taxe d’habitation sur les résidences secondaires et taxe d’enlèvement des ordures ménagères).
  • L’évolution de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) : les recettes de la TVA devraient évoluer de 5,5% en 2022. Cette mesure aura un impact positif sur la TVA versée aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) en remplacement de la taxe d’habitation pour les résidences principales.
  • L’évolution de la  cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) : l’estimation de baisse de la CVAE est de -4,7% en moyenne en 2022. Cette évolution sera variable et différente pour chaque territoire. Elle aura un impact négatif pour les EPCI à fiscalité professionnelle unique (FPU) et les communes appartenant à un groupement à fiscalité additionnelle.

L’actualité de la réforme de la taxe d’habitation

La compensation accordée par l’État pour la suppression du produit de taxe d’habitation est calculée à partir du taux voté par la collectivité en 2017. Les communes et EPCI qui ont augmenté leur taux de TH entre 2017 et 2019 voient ce produit supplémentaire leur être repris. La nouvelle loi de finances prévoit deux exceptions :

  • en cas d’adoption par la collectivité de mesures de redressement incluant une hausse de leur taux de TH en 2018 ou 2019 ;
  • en cas d’ajustements des taux entre communes et EPCI dans le cadre de pactes financiers et fiscaux.

Les montants supplémentaires de TH sur les résidences principales et de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) perçus jusqu’au 15 novembre 2021 seront intégrés dans le dispositif de neutralisation du coefficient correcteur. Les collectivités concernées bénéficieront d’une augmentation de leur produit de compensation.

À noter : les collectivités pourront à nouveau voter le taux de TH résiduelle à compter de 2023. Ce taux sera lié aux taxes foncières et il ne pourra pas augmenter plus que le taux de taxe foncière sur les propriétés bâties ou, s’il est moins élevé, que le taux moyen pondéré des deux taxes foncières. Ce point soulève certaines inquiétudes auprès des communes touristiques et fera l’objet d’une attention particulière de l’ANEM.

La révision unilatérale des attributions de compensation

La loi permet à un EPCI, par une délibération prise à la majorité simple, de réduire les attributions de compensation de ses communes sans leur accord, à condition qu’il constate une diminution de ses bases imposables conduisant à une perte du produit fiscal disponible. Les impôts concernés sont la cotisation foncière des entreprises (CFE), la CVAE, les impositions forfaitaires sur les entreprises de réseaux, la taxe additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés non bâties et la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM).

Quelles sont les précisions apportées par la loi de finances pour 2022 ?

  • La réduction peut être opérée soit sur l’attribution de la commune dans laquelle la perte de base est constatée, soit solidairement répartie sur l’ensemble des attributions des communes membres.
  • La baisse de l’attribution de compensation est limitée à 5 % des recettes réelles de fonctionnement de la commune.

Les concours financiers de l’État et la réforme des indicateurs financiers et fiscaux

L’enveloppe de la dotation globale de fonctionnement (DGF) reste globalement stable, mais des dotations spécifiques augmentent :

  • Dotation de solidarité urbaine (DSU) : + 95 millions d’euros (contre 90 millions en 2021).
  • Dotation de solidarité rurale (DSR) : + 95 millions d’euros (contre 90 millions en 2021).
  • Dotation d’intercommunalité : + 30 millions d’euros.
  • Effets de la hausse de la population : + 30 millions d’euros.

Ces augmentations seront financées par l’écrêtement de la dotation forfaitaire des communes et par celui de la compensation “part salaires” des EPCI.

La loi de finances pour 2022 réduit le nombre de communes subissant un écrêtement de leur dotation forfaitaire. Le seuil d’écrêtement est rehaussé, les communes écrêtées doivent avoir un potentiel fiscal au moins supérieur à 85 % de la moyenne pondérée par habitant au lieu de 75 % auparavant. Moins de communes subiront donc cet écrêtement, mais le montant nécessaire au financement de la péréquation sera plus élevé pour les communes concernées.

À noter que l’enveloppe dédiée au Fonds national de péréquation des ressources intercommunales (FPIC) ainsi que ses règles d’éligibilité et de répartition sont inchangées pour 2022.

La réforme des indicateurs financiers et fiscaux

Le potentiel fiscal ou financier et l’effort fiscal sont les principaux indicateurs utilisés pour répartir la DGF et le FPIC. La suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales, son remplacement par un nouveau panier de ressources et la réforme des impôts de production modifient le calcul de ces indicateurs financiers et fiscaux.  Le législateur souhaite donc réformer les calculs des indicateurs financiers et fiscaux afin qu’ils correspondent mieux aux ressources effectivement mobilisables par les collectivités : d’une part, de nouvelles impositions sont prises en compte dans le calcul du potentiel financier (la majoration de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires, la taxe locale sur la publicité extérieure, etc.) et, d’autre part, l’effort fiscal est calculé à partir du produit fiscal réel perçu sur le territoire de la seule commune.

Cette réforme est intégrée à la loi de finances pour 2022 mais elle ne devrait produire aucun effet cette année. La mise en place d’une « fraction de correction » doit permettre de lisser dans le temps les effets du nouveau calcul des indicateurs sur la répartition des dotations de la DGF. La loi de finances pour 2022 renvoie à un décret les modalités d’application dans le temps de cette fraction de correction.

Les effets de la réforme dans le temps sont : en 2022, une neutralisation complète des effets de la modification du calcul des indicateurs financiers et fiscaux, puis de la manière suivante : 90 % en 2023, 80 % en 2024, 60 % en 2025, 40 % en 2026 et 20 % en 2027 et enfin une prise en compte intégrale des nouveaux indicateurs en 2028.

Quelles sont les premières constatations ?

  • Une baisse mécanique de l’effort fiscal : le nouveau calcul, sans prendre en compte des produits intercommunaux, pourrait être défavorable aux communes les plus intégrées dans leur EPCI.
  • Du fait de la suppression de certains produits fiscaux, les efforts fiscaux vont mécaniquement diminuer. Cela peut remettre en cause la pertinence de ce critère souvent utilisé comme un seuil d’éligibilité (avoir un effort fiscal supérieur à 1 par exemple, pour bénéficier de certaines dotations).
  • Augmentation de certains potentiels financiers : le nouveau calcul pourrait être défavorable à certaines communes comme les communes touristiques (ajout de la surtaxe sur les résidences secondaires), les communes jouissant d’une attractivité importante (ajout des DMTO), ou encore les communes situées sur les axes du réseau électrique RTE (ajout de la taxe sur les pylônes électriques).
  • Le nouveau calcul intègrera désormais des produits fiscaux dont la levée est un choix politique. Ainsi, une commune décidant d’instituer la surtaxe sur les résidences secondaires, sera pénalisée au niveau de la DGF.

Soutien de l’État aux collectivités locales

Pour permettre aux collectivités locales de surmonter la crise, l’État s’est engagé à compenser leurs pertes de recettes fiscales via l’octroi d’une dotation compensatrice en 2020 et en 2021. Pour ce faire, les services de l’État ont calculé la moyenne des recettes fiscales entre 2017 et 2019 et, si l’exercice 2020 et/ou 2021 se soldait par un rendement fiscal inférieur à cette moyenne, l’État compensait. Cette clause de sauvegarde fiscale n’a pas été reconduite en 2022. La non-reconduction de ce mécanisme pourrait poser des difficultés aux collectivités, notamment à cause de la probable chute des recettes de CVAE.