Les 81 propositions des députés pour préserver l’eau face aux effets du changement climatique

Le 17 janvier dernier, Vincent Descœur, député du Cantal, et Yannick Haury, député de Loire-Atlantique, ont présenté les conclusions de la mission d’information, dont ils sont co-rapporteurs, sur l’adaptation de la politique de l’eau au défi climatique.

Les rapporteurs partent du constat que le cycle de l’eau est affecté par le défi climatique. En effet, la ressource en eau est sous tension. En France, la quantité d’eau renouvelable a baissé de 14% entre deux périodes : 1990-2001 et 2002-2018. De plus, les études laissent penser que la situation va encore se durcir. Certains territoires seront confrontés, notamment le sud et le nord, à des alternances d’inondations et de sécheresses. Le bassin versant de la Loire et le sud-ouest seront confrontés aux problèmes de remplissage des nappes phréatiques. En outre, la fonte des glaciers et de la couverture neigeuse va également avoir des conséquences sur les cours d’eau. Par ailleurs, la température de l’eau a déjà augmenté dans les principaux lacs et rivières européens, amenant au déclin de certaines espèces de poissons, aggravé par certaines activités humaines qui amplifient le phénomène.

Les rapporteurs préconisent donc d’adapter nos habitudes, sans solution unique : il est nécessaire d’agir simultanément sur tous ces fronts.

Leur rapport, fort de 81 propositions, propose donc d’agir sur plusieurs axes afin d’améliorer la résilience des territoires face aux effets du changement climatique sur la disponibilité de la ressource en eau et parer aux conflits d’usages. Il propose, en effet, des solutions fondées sur la sobriété hydrique, le stockage d’eau, la réutilisation des eaux usées, l’aménagement du territoire, les compteurs intelligents ou encore la tarification progressive, les aquaprêts, les outils fiscaux…

Ce rapport est constitué de trois volets :

  • La mise en lumière du poids du défi climatique notamment sur les prélèvements humains sur l’eau.
  • La manière d’adapter la politique de l’eau en rapport avec le réchauffement climatique en développant la sobriété hybride et la mise en place d’un nouveau partage.
  • La gouvernance et le financement des politiques de l’eau dont l’objectif est de traduire et de combler le déficit d’investissement.

L’ANEM, représentée par sa présidente, Pascale Boyer, avait été auditionnée en novembre dernier. Parmi les différents points soulevés par l’Association, l’un concernait le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux intercommunalités. Sur ce sujet, les rapporteurs suggèrent dans leur 64e proposition, comme le préconisait l’ANEM, de ne pas rendre obligatoire le transfert de ces compétences aux EPCI pour les communes faisant déjà partie d’un syndicat intercommunal ou d’un syndicat mixte performant.

L’ANEM avait par ailleurs souligné lors de son audition l’importance d’encourager la création des schémas d’aménagement et de gestion de l’eau (SAGE) et des commissions locales de l’eau (CLE) dans les territoires où il n’y en a pas et de soutenir les SAGE et les CLE qui existent déjà, élément repris dans la proposition n°47 du rapport.

Concernant le secteur agricole, touché par les phénomènes de sécheresse, les rapporteurs préconisent des dispositifs de stockage afin de lisser l’apport en eau dans l’année. Les retenues d’eau sont nécessaires mais elles doivent être modérées par l’évolution du modèle agricole et sa diversification vers de nouvelles filières afin d’optimiser l’usage de l’eau. La re-végétalisation est également une des méthodes à encourager selon les rapporteurs.

Par ailleurs, parmi les autres propositions du rapport, certaines sont intéressantes pour les territoires de montagne :

  • Proposition n° 4 : Identifier les principaux préleveurs sur les réseaux d’eau sur chaque bassin versant, connaître leur seuil de vulnérabilité et évaluer les besoins saisonniers.
  • Proposition n° 6 : Imposer le déploiement de compteurs de consommation d’eau en temps réel pour les acteurs économiques, agricoles et industriels en contrepartie d’une aide financière de l’État ou des agences de l’eau.
  • Proposition n° 17 : Prévoir un soutien financier et technique systématique des services de l’État aux collectivités dans la réalisation des études et documents préalables à la demande de préemption d’une aire d’alimentation de captage (AAC).
  • Proposition n° 18 : Prévoir un soutien des services de l’État aux communes après leur acquisition des zones préemptées dans les aires d’alimentation de captage (AAC), notamment afin de favoriser sur ces zones le développement de forêts, de prairies permanentes ou de pratiques agricoles encadrées.
  • Proposition n° 19 : Prévoir un droit de préemption d’office par le représentant de l’État dans le territoire si le risque de pollution de l’aire d’alimentation de captage (AAC) est avéré.
  • Proposition n° 31 : Encourager les collectivités territoriales en vue du renouvellement de leur réseau, à se doter d’une stratégie patrimoniale contenant des objectifs chiffrés de renouvellement.
  • Proposition n° 32 : Généraliser le conditionnement des aides des agences de l’eau aux collectivités territoriales, à un tarif minimum de l’eau, qui permette de financer une partie de leurs investissements.
  • Proposition n° 41 : Encourager le stockage de l’eau dans les territoires les plus marqués par les irrégularités de la ressource en eau.
  • Proposition n° 49 : Renforcer le processus d’anticipation et d’implication des différents acteurs dans la préparation des arrêtés sécheresse. Coordonner l’action des services de l’État par la mise en place de préfets coordonnateurs à l’échelle des sous-bassins lorsque c’est nécessaire.
  • Proposition n° 50 : Mettre à jour dans chaque département un schéma d’interconnexion qui identifie les fragilités d’approvisionnement des différentes communes et précise les mesures structurelles à prendre pour sécuriser l’approvisionnement en eau, ainsi que les mesures de crise possibles en cas de rupture d’approvisionnement.
  • Proposition n° 52 : Inscrire l’objectif de réduction de 10 % des prélèvements de la ressource en eau douce dans la loi et le compléter par un objectif de – 25 % d’ici 2040. Décliner ces objectifs dans les SDAGE et les SAGE.
  • Proposition n° 66 : Permettre la délégation de la compétence eau vers les syndicats départementaux constitués et non plus seulement vers les EPCI.
  • Proposition n° 69 : Prévoir un soutien à l’ingénierie et à la rédaction de contrats de délégation incluant des enjeux environnementaux par les agences de l’eau ou l’ANCT au profit des collectivités qui en feraient la demande.
  • Proposition n° 80 : Encourager les collectivités à mettre en place une tarification progressive de l’eau et interdire par la loi toute tarification dégressive incitant au gaspillage, à l’exception des services d’intérêt général comme les hôpitaux.
  • Proposition n° 81 : Mettre en place une tarification saisonnière dans les régions touristiques et étudier la possibilité de généraliser cette faculté dans toutes les zones en tension.

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